L’Épochè est un idée tout droit issue de l’antiquité : voyons ensemble en quoi elle peut nous aider de nos jours.

Ce concept philosophie est complexe, puisqu’il a changé de sens et d’interprétation en fonction des époques, écoles de pensée, et auteurs. Cet article ne sera donc qu’une ouverture à ma vision personnelle de cette idée : je vous invite à lire sur le sujet pour vous faire votre propre opinion.

Signifiant « suspension/arrêt (du jugement) » en grec, il s’agit chez Zénon d’une prudence intellectuelle : le sage ne donne pas son assentiment précipité à des représentations. Il se garde d’avoir une opinion basée sur ses émotions, son histoire personnelle ou ses désirs mais reste réaliste, sage et maître de lui-même. On ne doit croire qu’en ce qui est certain.

Les sceptiques en feront une des bases de leur pensée en l’extrapolant : il s’agit alors de considérer que puisque rien n’est connaissable avec certitude il convient de n’avoir aucun jugement sur rien. L’Épochè devient alors un art de vivre en soi.

Épochè et pensée indienne : photo d'une sculpture de chakra dans un temple hindou

C’est Carnéade qui, à mon sens, donnera la version la plus saine de l’Épochè : sans avoir d’opinion, le sage pourra donner son assentiment à des représentations vraisemblables.

Voilà comment je résumerais l’Épochè :

  1. Le sage n’a pas d’opinion : nul ne doit croire à quoi que ce soit a priori. Le sage ne laisse pas ses pensées être guidées par la morale, sa culture, ses goûts, passions, pulsions, émotions ou soin histoire personnelle. Il vise à comprendre le monde tel qu’il est sans projeter ses fantasmes sur lui.
  2. Rien n’est sûr, tout est une question de probababilité : tout en se gardant de l’opinion, le sage pourra donner son assentiment pour une idée qui lui semble probable. La probabilité me semble bien expliquée par les critères de Poppers : en cela, le sage ne donne jamais qu’un assentiment temporaire à une assertion. Il est intérieurement et émotionnellement détaché quant aux idées. Si on lui prouve qu’il a tort il ne le prend pas personnellement car il n’est pas défini par ses idées mais par sa quête de vérité. Le sage ne pensera jamais en terme d’absolus et de certitude : il n’est jamais manichéen.
  3. Utilité de l’idée : puisque la vérité ultime est inaccessible à l’homme, le sage sait que sa quête est vaine mais indispensable. Quand il ne peut pas juger de la probabilité d’une idée, il peut néanmoins la rejeter ou l’accepter temporairement en fonction de son utilité. Prenons l’exemple de l’hypothèse de la simulation selon laquelle notre monde serait une simulation informatique : cette idée est à la fois improuvable, et malsaine. Elle conduit à l’irréalisme, l’irrationalisme voire au sollipsisme. Etant extrême et mauvaise pour l’homme, le sage peut la rejeter en attente de preuves la prouvant ou la validant. Il en va de même pour les concepts métaphysiques : le philosophe, par l’Épochè, pourra donner son assentiment à telle ou telle idée métaphysique (qui n’est donc pas du domaine du scientifique) car il n’est pas scientiste ou positiviste.

De nos jours, pratiquer l’Épochè c’est se détacher de ses opinions : il ne s’agit pas de ne rien penser, mais de ne pas tomber dans le fanatisme pour sa propre personne. En effet le monde est tel qu’il est et il faut se comprendre soi-même pour ne pas projeter sur l’univers nos propres désirs et insécurités. On remarque en effet souvent de nos jours que les parangons de la tolérance ne supportent pas qu’on ne pense pas comme eux par exemple : c’est faire montre d’une grande immaturité que de perdre son sang froid face à une pensée autre. C’est un mépris de l’altérité, mépris d’autant plus hypocrite de la part d’humanistes auto-proclamés. Je pense que notre civilisation subit actuellement une crise d’adolescence métaphysique : chacun pense que l’univers doit se plier à ses désirs, que ce monde lui doit quelque chose. Tout est question, chez certaines personnes, de revendication identitaire, et de réparation.

L’Épochè permettrait de soigner notre monde : la vraie tolérance n’est pas le fait de se plier aux dernières modes moralistes et idéologiques, ou d’accepter chaque revendication même absurde. La vraie tolérance c’est avant tout admettre l’existence d’un autre que soi. Savoir ne pas être outré par des propos, et ne pas apposer un jugement moral sur chaque chose, idée ou personne. Ainsi, en appliquant l’Épochè à soi, au monde, aux autres, on peut apprendre à être plus sain, détaché vis-à-vis de ces opinions que nous considérons comme des parties de nous-même.


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